Où allons-nous ?
Pour qui s’intéresse et aime la politique, toute élection s’accompagne d’une grande tension, tant avant et pendant le vote que lors de la proclamation des résultats. Aucune exception ce dimanche 24 septembre au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères pour l’élection de six des douze sénateurs représentant les Français de l’étranger. Dix listes se présentaient au suffrage des 543 grands électeurs : conseillers, délégués consulaires et parlementaires représentant les Français établis hors de France. Ont été élus Hélène Conway-Mouret et Jean-Yves Leconte, Joelle Garriaud-Maylam (LR). Ronan Le Gleut (dissident LR) ainsi que Jean-Pierre Bansard et sa suivante de liste Evelyne Renaud Garrabedian. Un certain nombre d’incertitudes entouraient les deux nouveaux élus de la liste Bansard : à quel groupe vont-ils appartenir ? Vont-ils soutenir le gouvernement, être dans l’opposition ? Vont-ils voter le budget ? L’incertitude est aujourd’hui levée : ils ont intégré le groupe des Républicains.
Il faut quand même rappeler que le rôle d’un parlementaire est de voter la loi et de contrôler l’action du gouvernement, il serait donc bon de connaître les positions politiques d’un candidat avant de voter pour lui, non ? Où bien, y aurait-il d’autres arguments qui nous échappent ?
Après ce renouvellement par moitié du Sénat, la position de la droite (LR et centristes) se trouve confortée. Cependant la gauche a bien résisté et les pertes du groupe socialiste et républicain sont moins importantes que prévues, le groupe communiste avec ses dix élus pourra se maintenir au contraire du groupe écologiste.
La surprise de ce scrutin vient de la République en marche qui n’a clairement pas atteint ses objectifs. Deux raisons peuvent expliquer ce premier revers électoral pour le parti du Président de la République. D’une part le mouvement n’existait pas lors des scrutins précédents et n’était donc pas très implanté parmi les grands électeurs. D’autre part, beaucoup de grands électeurs ont tenu à faire part de leur hostilité à certaines annonces faites par le gouvernement depuis l’été (par exemple la baisse des dotations aux collectivités territoriales pour le territoire national et le gel des crédits de l’Enseignement français à l’étranger de 33 millions pour 2017).
Maintenant que les deux Chambres ont été renouvelées, les forces en présence sont claires. Les réformes institutionnelles annoncées par le président pourront-elles être menées ? Une majorité des 3/5 étant nécessaire, la République en Marche devra nécessairement convaincre au-delà de ses rangs.
Face à l’hégémonie du groupe LREM à l’Assemblée nationale, et malgré le fait que le Palais Bourbon ait le dernier mot, le Sénat sera amené à jouer un rôle important dans les 5 ans à venir.
Plus que jamais nous pouvons nous féliciter de l’existence de la Haute assemblée et du bicamérisme qui, en permettant un double regard sur les textes étudiés, est le garant d’une démocratie équilibrée.
A l’heure où certains souhaiteraient affaiblir voire supprimer le Sénat, il est manifeste que sa disparition priverait les institutions d’un lien fort entre l’Etat et les collectivités territoriales, entre le niveau local et le niveau national et se traduirait par un appauvrissement de la représentation et de la fonction de contrôle pourtant indispensables en démocratie.
Claudine Lepage